4h25 : boum, boum.
J’ouvre un œil,
puis le second. Il fait sombre. Silence. J’ai donc rêvé. Pourriture de rêve qui
dégouline sur la période éveillée. Ça nous arrive à tous. Je tente de me
rendormir, ma moitié étant encore dans les bras de Morphée. Je ferme un œil,
puis le second.
4h26 : Boum !
Boum ! Boum !
Cette fois j’ai
les yeux grands ouverts. Un doute, cependant. Ce ne sont pas les malades qui
remettent ça quand même ? Je me lève, vais à la fenêtre. Entrouvre. Ce n’est
pas un crétin qui frappe sur une poubelle vide. Ce sont des détonations. Rafales.
Taratata ! Tac Tac tac. Un calibre plus gros que l’autre. Semi
automatique. Rafales courtes. Par rapport où nous nous trouvons, c’est vers le
métro Porte de Paris. La guerre s’arrête quelques minutes. Explosion. Le bruit
de tirs qui se déplacent. On a passé 4h30. Je crois que ça suit la ligne de
tram, vers le RER. Puis plus rien. Fini. Nada. Niet. Oualou ! (en
plusieurs langues, car je suis Dyonisien et fier des mélanges culturels).
J’attends, passe
sur les réseaux sociaux. Laisse un message sur le PiafBleu pour savoir si je
suis le seul à y avoir prêté attention. S’il y a un truc spécial, si je délire.
Rien. 20mn de spectacle auditif plus tard : calme plat.
Je retourne me
coucher.
5h. La fête à
Kalach reprend. Explosion. Détonation. Tac Tac Tac. Le rythme change. Les
silences se multiplient. Je ne peux plus dormir. Je me lève. C’est définitif,
je ne fermerai plus l’œil… J’allume l’ordinateur, en quête d’infos. Les
premières news tombent : « intervention de police à Saint-Denis ».
Les tirs reprennent. Un hélico entre dans la danse. Mes pensées stupides se
multiplient : des Famas ? Des Kalach ? Ça crache du lourd !
Alors c’est à ça que ressemblent les nuits des gens, de l’autre côté de la méditerranée ?
On s’y habitue ? On peut dormir avec ce genre d’attaques sonores ? Le
Président à dit qu’on était en guerre : purée, c’est ça la guerre ?
Les minutes
passent, les médias racoleurs se jettent sur les premières miettes. Premiers
messages amicaux pour savoir si on va bien. Ma moitié et maintenant là, pas
loin. On se colle à CharognardTV. Les seuls à donner des informations pour le moment. Les accalmies laissent place à de
nouvelles détonations. Le jour se lève. D’autres médias un peu plus sérieux
mais moins réactif commentent l’intervention du RAID et de la BRI. La valse
médiatique tourne en rond. Pas d’info concrète. Pourtant, bêtement, entre deux
messages pour rassurer nos proches, on a le cerveau branché dessus. Puis, les
combats cessent, les messages pour rester chez soit tombent. Les flics
débarquent dans la rue, repoussant à coup d’ordres secs les « journalistes »
et les badauds en manque de sensations, portables à la main. Une voisine sort
la tête par la fenêtre. Elle interpelle une connaissance sur le trottoir d’en
face. L’homme nous dit que lui et des collègues sont arrivés dans une rue, se
sont fait braquer par quatre types en jeans avec des vestes militaires des
cagoules et des kalachnikovs.
Petit à petit, il
n’y a plus que le bruit de CharognardTV. Au bout d’un moment, résignés à être
bloqués chez nous, on se déconnecte et on reprend une vie « normale ».
Donc oui, nous
allons bien. Et merci à tous ceux qui nous ont contactés pour prendre des
nouvelles. Demain est un autre jour, j’aurai dormi… et je repartirai en quête
de bonheur et de créativité : juste pour faire la nique aux bas du front
en chasse d’étranger (en l’occurrence l’histoire ne leur donnera que des Belges
pour « étrangers ») et aux pourritures qui se croient tout permis,
derrière leurs armes achetées aux Européens avec des seaux remplis de liquides
aussi sombres et poisseux que leur esprit.
Nb : c’est juste
un épisode partagé. Un ressenti, non pas pour raconter ma vie dont tout le
monde se moque, mais qui m’a semblé important de raconté. Ça m’est venu quand j’ai
lu le billet de Catherine, mieux écrit, plus intéressant.
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